Bruxelles critique les régulateurs nationaux dans les télécoms
BRUXELLES - La Commission européenne a vivement attaqué mercredi les autorités nationales de régulation des télécommunications, dont l'inefficacité justifie selon elle la création d'une autorité paneuropéenne dans ce secteur.
L'exécutif européen entend présenter le 13 novembre une proposition en ce sens malgré l'opposition de nombreux Etats membres, ce qui a incité Ed Richards, qui dirige Ofcom, l'autorité britannique de régulation, à sortir du bois.
"Une centralisation des pouvoirs à Bruxelles, avec une nouvelle bureaucratie européenne, n'est pas la réponse adéquate", a-t-il écrit dans une tribune publiée mercredi par le quotidien britannique des affaires, le Financial Times.
Pour lui, le Groupe des régulateurs européens (ERG) fait son travail pour améliorer le marché intérieur des Télécommunications et une autorité européenne forte de 100 personnes risquerait de mettre en péril les progrès réalisés.
"Il y a un véritable risque que les propositions visant à renforcer la régulation indépendante au niveau national soient mises en danger au niveau européen", a ajouté Richards.
Ce dernier joue ainsi sur les divisions internes à la Commission, dont certains membres estiment que le projet de Reding, qui veut permettre aux autorités de tutelle de contraindre les opérateurs à scinder leurs activités de réseaux et de services s'ils ne sont pas sur des marchés concurrentiels, va trop loin dans les circonstances actuelles.
Les adversaires du projet à Bruxelles objectent en effet qu'il entraînerait davantage de bureaucratie et nuirait aux investissements, une position partagée par certains anciens monopoles de l'industrie européenne des télécoms.
ENDROITS DE RÊVE
Mais de nouveaux arrivants dans le secteur font valoir qu'une "séparation fonctionnelle" des activités est indispensable pour faire triompher la concurrence, notamment au niveau des services Internet à haut débit.
La Commission a réagi avec vigueur à la tribune de Richards, qui porte d'autant plus que le Royaume-Uni est l'un des rares pays à avoir procédé à la séparation fonctionnelle.
Pour Martin Selmayr le porte-parole de la commissaire chargée des Télécommunications, Viviane Reding, l'ERG n'a pas servi à grand-chose depuis sa création en 2003.
"L'ERG n'est en aucune manière capable de créer un marché unique pour les opérateurs de télécommunications et les consommateurs", a-t-il déclaré lors d'un point de presse.
"L'ERG est en place depuis 2003. Qu'ont-ils fait depuis cette date? Tous les dossiers (...) n'ont pas reçu de réponse claire de la part du Groupe des régulateurs européens", a-t-il dit en stigmatisant leurs fréquentes réunions dans des lieux de rêve, comme Madeire et Capri, "aux frais des contribuables".
"Vingt-Sept personnes se réunissant autour d'une table ne se mettront d'accord sur rien d'ambitieux à moins d'introduire le vote à la majorité qualifiée", a ajouté le porte-parole, soulignant que la Commission voulait mettre fin à l'unanimité.
Pour voir le jour, la future autorité européenne de régulation doit obtenir l'approbation du Parlement européen et d'une majorité qualifiée d'Etats membres de l'UE.
Mais Martin Selmayr a insisté sur le fait que la Commission n'entendait pas qu'elle remplace les autorités nationales: son but sera avant tout d'assurer qu'elles soient indépendantes des pouvoirs politiques ou des opérateurs de télécommunications.
Outre ce dossier précis, l'exécutif européen doit aussi présenter le 13 novembre une proposition pour libéraliser l'accès aux fréquences de télécommunications.